Je suis présentement à l’Université de Montréal, en train de réviser pour l’examen de mon cours Sciences du langage qui aura lieu dans moins d’une heure.

En relisant mes notes, je suis tombé sur un passage peu banal qui mérite qu’on s’y attarde. Il s’agit de l’origine du mot snob :

Le mot snob vient de l’anglais. Quand on voulait faire passer des enfants pauvres dans les écoles, il était noté à côté de leur nom la mention s.nob. C’était un raccourci pour le terme latin sine nobolitate qui signifiait en gros sans noblesse.

Il va sans dire que le sens s’est complètement inversé depuis le temps.

Vous avez peut-être déjà entendu quelqu’un dire « de bonnes gens ». Personnellement, je me souviens avoir couru à mon père, ma bédé sous le bras, pour lui dire « J’ai trouvé une erreur dans ma BD », pour finalement retourner dans ma chambre, la mine basse, après avoir appris qu’en effet, le mot « gens » peut être au féminin.

Encore faut-il connaître la règle, car c’en est tout une, et dans mon cours « Difficultés du français écrit » on se la fait marteler depuis le début de la session.

Voici donc cette fameuse règle.

Le mot « gens » sera féminin seulement si :

  1. S’il est immédiatement précédé d’un adjectif
  2. Si l’adjectif qui le précède a une forme différente au masculin et au féminin (ex : beau->belle, contrairement à honnête qui est identique dans les deux genres)

MAIS sera masculin si :

  • Gens fait parti d’une expression comme « Gens de lettres » ou « Gens de robe »

DONC :

« D’honnêtes et bonnes gens » -> Gens est féminin, car il est placé immédiatement après l’adjectif, et ce dernier a une forme féminine distincte.

« De bons et honnêtes gens » -> Gens est masculin, car bien qu’il soit précédé d’un adjectif, celui-ci ne change pas de forme au féminin.

« Voilà de bons gens de lettres » -> Gens est masculin car il fait partie de l’expression « gens de lettres ».

Notez bien : Même si le mot « gens » est féminin, le reste de la phrase NE LE SERA PAS. (Ex : Ces bonnes gens sont fort gentils.)

J’espère n’avoir rien oublié, si vous en avez plus à ajouter, n’hésitez pas à le faire dans les commentaires.

Sur mon réfrigérateur, j’ai un aimant de la banque « ING Direct » dont la seule utilité est de maintenir en place des recettes ou des papiers importants. C’est une petite promo, plutôt mignonne, que j’ai reçu par courrier il y a assez longtemps.

L’aimant fait la promotion d’une campagne d’ING Direct qui s’appelle « Réalise ton but ».

Je ne sais pas pourquoi ça ne s’est fait que récemment, mais l’autre jour, en posant le regard sur cet artifice à frigo, mes dents ont grincé.

« Réalise ton but » ?

Après une vérification dans mon fidèle Robert En Ligne, l’évidence se confirme : Tout comme c’est le cas pour un objectif, on ne « réalise » pas un but, un atteint un but, ou on touche un but. Si l’on doit réaliser quelque chose, c’est un rêve ou un plan que l’on réalise.

C.Q.F.D.

Lors de mon second cours de Difficultés de la langue française, nous avons passé quelques minutes sur la stylistique. Plus particulièrement sur le poids que peut apporter à une phrase un terme judicieusement sélectionné.

Car parfois, lorsqu’on veut traduire un mot anglais, nous avons un choix très varié de termes disponibles en français. Si un mot peut être neutre, un autre peut faiblir la phrase, ou encore l’enrichir davantage.

Par exemple, pour le mot cheval, on peut également utiliser « canasson » qui est plus péjoratif, s’il s’agit d’un vieux cheval pas très en forme. Mais nous pouvons également dire « destrier » s’il s’agit d’un cheval pure race.

L’utilisation judicieuse de cette diversité de termes peut permettre d’économiser des mots et d’aider à la description d’une situation.

Voici donc d’autres exemples de termes stylistiques pouvant être utilisés.

Termes familiers Termes neutres Termes renforçants
Boule Tête Chef
Clou Portemanteau Patère
Dégringoler Tomber S’abatre
Costaud Fort Vigoureux
Chahut Bruit Vacarme
Éreintant Fatiguant Exténuant
Frousse Peur Effroi
Rappliquer Revenir Accourir
Balade Promenade Excursion

Remarquez comment l’utilisation de « clou » plutôt que « portemanteau » en dit long sur la situation du protagoniste. Et comme « s’abattre » a un sens définitif en comparaison à « tomber », alors que « dégringoler » laisse croire à une situation répétée et sans fin.

Bon. C’est peut-être banal pour vous lecteurs, mais tous ceux qui peuvent être traités d’obsédés textuels comprendront. Trouver le bon mot c’est, pour plusieurs, une mission divine.

Pour plus d’information sur la stylistique, il semble que l’on puisse se procurer l’ouvrage « Stylistique comparée du français et de l’anglais », par Jean-Paul Vinay. J’ajoute ça à ma « wish list. ».

Pour mon cours Difficultés du français écrit, nous avons une longue liste de livres de référence, dont seulement deux sont obligatoires (si on ne compte pas le cahier de notes et d’exercices du professeur).

Naïvement, je croyais pouvoir m’en sortir avec quelques dizaines de dollars, comme pour les autres cours d’université que j’ai suivis auparavant. Que neni. Il faut dire que Programmation Internet et Introduction à la culture et à la langue du Japon n’étaient pas nécessairement des cours où la théorie prenait de la place.

Donc, je me suis procuré les documents obligatoires.

  • Le Petit Grévisse
  • Grévisse : Exercices de grammaire française
  • Grévisse : Corrigé des exercices de grammaire française.

Le troisième bouquin n’était pas obligatoire, mais pour savoir si nos exercices sont bien faits, pas trop le choix. Le tout m’a coûté un peu plus de 100$ chez Renaud-Bray, au grand dam de mon portefeuille. Car j’ai encore un cours à prendre où je devrai sans doute acheter des livres, possiblement encore plus chers.

Je trouve un peu sacrant d’avoir à payer si cher pour un livre d’exercice et ses réponses. Quant au Petit Grévisse, le prof nous a juré que s’il nous croisait dans le métro sans ce bouquin, il nous coulait. J’imagine que ce livre nous servira souvent. J’espère.

Les autres livres dans la liste ne sont pas obligatoires, mais on doit y avoir accès.

  • Le Bon Usage, une sale brique de 20lbs qui coûte entre 130$ et 160$. Ce sera un investissement lorsque je commencerai la profession, mais pour là, je me contenterai d’y avoir accès.
  • Bescherelle, j’ai sûrement ça quelque part.
  • Le Petit Robert, un incontournable que je n’ai jamais eu en ma possession. Ce ferait un joli cadeau de Noël ou de fête ça 😉
  • Hanse, dictionnaire des difficultés du français. Bof.
  • Multidictionnaire de la langue française. Je l’avais au cégep, merde il est où? Je l’aimais bien…
  • Le Colpron, dictionnaire des anglicismes. Un « must » (remarquez l’ironie). Je le veux. Je déteste utiliser des anglicismes, je passe beaucoup de temps à trouver les bons mots français pour me défaire des anglicismes. Je suis toujours le seul à dire « téléverser » plutôt que « uploader », au boulot.

Avant de me pointer chez Renaud-Bray, j’ai quand même pris la chance d’aller voir dans une petite bouquinerie pas trop loin de chez moi, à tout hasard. Des livres usagés, quand ils sont récents, sont bons pour encore longtemps.

Je suis sans doute l’un des rares à m’attarder dans les sections les moins populaires (genre « Langues »). J’ai trouvé un exemplaire du Bon Usage à 30$, mais il datait de 1980. J’ai trouvé un Colpron aussi, mais je n’en avais pas les moyens car j’appréhende beaucoup les achats à faire pour mon second cours.

J’ai aussi trouvé un petit joyau « Introduction à l’ancien français ». Ma salive coulait par terre. Suis-je le seul à voir des arcs-en-ciels et des pouliches quand je lis des trucs comme :

La meisnie a Sathan est el mustier venue
En sa destre main tint chascuns s’espee nue

Vit de cleres colors la mostier peinturet
De martirs et de virgenes et de granz majestez…

(merci au groupe black métal français Anorexia Nervosa et à leur chanson « Enter the church of fornication » pour cet extrait de vieux français. Allez savoir si c’est authentique…)

Quand j’aurai terminé ces études, j’aurai une petite fortune en livres, dictionnaires et autres documents de référence. Je m’achèterai une biblio en or massif, ou bien un coffre-fort, pour les ranger.

Ma passion pour les mots ne date pas d’hier. Mais pourquoi la traduction en particulier?

Je me rappelle un certain cours de français à l’école secondaire. Il fallait trouver « le bon mot ». Par exemple : Un nuage s’échappe de la cheminée. On dit que la cheminée ____________. Réponse : La cheminée fume. Ça demandait un vocabulaire varié, précis, et un peu d’imagination. J’avais adoré cet exercice, qui n’était pas sans me rappeler ce fameux jouet de ma jeunesse : Une roulette dont on pouvait tirer la corde, et qui nous expliquait le cri d’un animal au hasard. « Le cheval hennie.  Hiiignignigni ».

J’ai pu goûter au merveilleux monde de la traduction à l’âge de 20 ou 21 ans, alors qu’un cours d’Introduction à la traduction était inclus dans mon programme technique au Cégep.

Dans ce cours, j’ai pu mettre un nom sur quelque chose qui m’intéressait depuis longtemps : l’étymologie. L’origine des mots. Mais également l’origine des expressions, et aussi de la langue. Le vieux français? Du bonbon pour moi, sans parler des faux amis, et d’autres particularités (et disparités) qui existent d’une langue à l’autre.

Tout cela grâce à un hot chicken

Le premier exemple qui m’a marqué et qui a retenu mon intérêt, c’est lorsque le professeur nous a parlé du fameux hot chicken.

En effet, la plupart des menus en français au Québec affichent « poulet chaud » ou « sandwich au poulet chaud » à côté de l’image du valeureux hot chicken sauce brune. Il semble donc que ce ne soit qu’une grossière erreur!

Le vrai terme, nous expliquait le professeur, était hot chicken sandwich. Pour traduire, il faut décortiquer le terme, et se demander : que qualifient les adjectifs qualificatifs? Qu’est-ce qui est chaud? Est-ce le poulet qui est chaud, ou est-ce le sandwich qui est chaud? Ben, il s’adonne que c’est le sandwich qui est chaud. En conséquence, le bon terme, en français, serait « sandwich chaud au poulet », et non « sandwich au poulet chaud ».

C’est banal comme exemple, vous me direz, mais ça veut aussi dire que les centaines de restaurants à déjeuner qui affichent « sandwich au fromage grillé » pour dire grilled cheese sont dans l’erreur. Changez-moi ça pour « sandwich grillé au fromage »!

10 ans plus tard, j’ai décidé un bon soir de retourner aux études, et d’entreprendre cette aventure. Il n’est jamais trop tard pour bien faire, et surtout pour se faire plaisir. Je travaille 40 heures semaine dans une boite qui fait des sites Web, je gagne très bien ma vie, mais j’ai décidé que la vie ne s’arrêtait pas là.

J’ai pris mon premier cours du Certificat en Traduction de l’Université de Montréal cette semaine.

Je suis Le Traduiseur, j’ai 31 ans, je réoriente ma carrière, et je n’ai jamais été aussi sur de moi.